• Nous reprenons notre récit à Santiago. Nous avons loué un appartement au centre-ville. Le camion est une fois de plus dans un garage, mais nous, nous savourons le retour du soleil et de la chaleur, après nos longues semaines australes. La piscine, sur le sommet de l'immeuble, offre une vue magnifique sur la ville.

    01 Santiago

    C'est ici que nous retrouvons nos chers Majuline qui ont traversé la Cordillère des Andes une deuxième fois pour nous rejoindre. Ils ne voulaient plus nous croire quand nous leur certifions que nous voyagions en camion !

    Dès la réception du camion, nous prenons ensemble la route au Sud de Santiago. Première nuit dans une station essence au bord de l’autoroute que nous quittons le lendemain au niveau de Talca pour prendre la direction du refuge de Tricahue. Le refuge est tenu depuis 7 ans par Dimitri, un voyageur belge parti pour un tour du monde en vélo, qui, au cours de son voyage, est tombé amoureux de la région et ne l'a plus quitté depuis.

    02 Avec les Majuline

    Enfin, c’était ce qui était prévu. C'était sans tenir compte des caprices de notre camion qui a décidé de nous pourrir notre passage au Chili : la tringle qui relie le levier de vitesse à la boite de vitesse se rompt en cours de route. La boite est bloquée au point mort, impossible de continuer. Avec l'aide de Martin, Laurent parvient à passer manuellement une vitesse directement au niveau de la boite, et tente de démarrer en cote, détruisant au passage l'embrayage du camion ! On décide trop tard de passer la vitesse courte, car la boite de transfert, elle, marche, pour faciliter le démarrage. C'est donc sans pouvoir changer de vitesse, ni pouvoir s’arrêter, ni reculer que nous couvrons, à la vitesse de 30 km/h les derniers kilomètres qui nous séparent du refuge. Nous n'avons pas le droit à l'erreur dans le choix de notre itinéraire car nous ne pourrons pas faire de manœuvre sur la route et par conséquent, pas pouvoir faire demi-tour. C'est bien sur là que l’inévitable survient : un pont qui affiche une charge maximum de 5 tonnes, alors que notre camion en fait 9 ! Cependant, il a l'air solide, et c'est en retenant notre souffle que nous nous engageons. Ça passe ! De toute manière, de tels panneaux d'indication de charge n'existent pas en Afrique et nous nous sommes engagés sur bien plus fragile ! Nous apprendrons par la suite que les semi-remorques s'y engagent malgré l'avertissement. N’empêche...

    02 Avec les Majuline (1)
    02 Avec les Majuline (2)

    Nous passons 4 jours dans le refuge. Nous y retrouvons pour notre plus grand plaisir Céline et Adrien, les backpackers avec qui nous avons convoyé en Terre de Feu, et que nous avons revus ensuite sur le bateau dans les fjords Chiliens. Il fait toujours aussi chaud. Nos promenades ont toujours pour objectif un point d'eau ou une cascade. Aux randos, nous alternons un peu de mécanique, des fabuleux assados (barbecue local, une véritable institution) et cours du CNED. Corentin et Jules sont tous les deux CM2. Laurent prend en charge le français et Christine les maths. Virginie s'occupe de Marine et Eliott. C'est une expérience nouvelle de vivre une vraie classe, même avec un effectif de deux élèves ! Les hommes parviennent à faire ressouder la tringle du camion. Pour l'embrayage, il faudra voir à Talca.

    02 Avec les Majuline (3)

    Nous avions prévu de se faire ensuite un bout de brousse, agrémenté de bivouacs sauvages avec les Majuline. A la place, nous devrons une fois de plus, traîner un camion handicapé jusqu'à la première grande ville et nous mettre à la recherche d'un garage. Le premier coup sera le bon. Nous trouvons un garage spécialiste de l'embrayage à Talca et faisons la connaissance de Claudia et Marco, les propriétaires. Expérience inédite pour les Majulines qui passent la première nuit de leur voyage dans un garage. Que le monde est injuste ! Nos hôtes sont absolument charmants. Nous sommes pris en charges et immergés dans la culture, l’accueil et la bonne humeur Chilienne dès le premier soir.

    03 Talca (2)

    De Buenos Aires à Talca, les moments passée avec les Majuline (pour nous et nous seulement : les Cajoline) n'ont été que joie et bonne humeur. Les circonstances ont fait que nous n'avons pas pu vivre ensemble l'aventure nature que nous avions prévu. Nous savons que nous ne les croiserons certainement plus pour ce voyage, mais nous nous sommes promis de nous revoir en France au plus vite. Leur compagnie a été un moment fort de notre aventure.

    Après le départ des Majuline, nos hôtes ne nous quitterons pas, renchérissant sans cesse d'intention, au risque de frôler l'étouffement ! Ils nous font entre-autres la visite de leur ville. Bon nombre d'édifices a été lourdement touché par le tremblement de terre qui a récemment secoué le Chili. Dans le garage, alors que nous sommes tous dans le camion, nous trouvons qu'ils y vont un peu fort pour un simple embrayage, tant le camion bouge. C'est en sortant et en voyant les figures affolées de tous, que nous comprenons que nous venons à notre tour de subir une secousse de magnitude 6, dont l'épicentre se situe à Conception, soit à 200 kils de Talca ! Un camion 4x4 est donc le refuge idéal en cas de tremblement de terre...

    Bien que les réparations soient terminés en deux jours, ils insistent pour que nous partions ensemble camper le week-end. Nous refusons en essayant de ne pas les froisser, tant il nous tarde de reprendre la route et de nous retrouver un peu tous les 5. En effet, nous n'avons pas été seuls depuis Ushuaia et avons été éprouvées par le stress des pannes en chaîne. De plus, nous commençons à prendre du retard sur la scolarité.

    Nous ne faisons pas plus de 100 kils, avant qu'un autre élément du système d'embrayage ne lâche à son tour. Un joint de piston lâche et tout le liquide est à terre. Nous sommes samedi et de nouveau en panne sur l'autoroute. Nous appelons Marco qui arrive aussitôt et nous explique qu'il ne pourra pas réparer avant lundi, car il ne dispose pas de la pièce. Nous ne pouvons plus nous soustraire à leur invitation à camper !

    Dans l'ordre : assado, vin, sieste, baignade, puis on recommence ! Jamais nous n'avons aussi vite progressé en Espagnol ! L'ambiance est décontractée et sympathique. Immersion totale.

    03 Talca

    Nous reprenons lundi le route des vignobles, en direction de Valparaiso. L'embrayage semble tenir... Petit arrêt dans le village de Cartagéne (déjà?) où nous nous préparons à bivouaquer au bord de la plage. C'est sans compter les avertissements de menace de tsunami qui affolent les enfants, en particulier Charlotte. C'est sous leur pression que nous reprenons le route à 22h et arrivons au milieu de la nuit dans la cité balnéaire de Vina del Mar, non loin de la fameuse Valparaiso.  Nous garons le camion au bord d'une plage bondée de monde et partons découvrir la ville en transports en commun, admirant le vol des pélicans et l'architecture coloniale et colorée.

    04 Valparaiso
    04 Valparaiso (2)
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    04 Valparaiso (3)

    Départ aux aurores le matin, avec pour objectif le franchissement de la Cordillère des Andes, pour rejoindre Mendoza, en Argentine dans la soirée. Le paysage est superbe. Les virages se succèdent à toute vitesse. Ça grimpe... Chamaco franchit à son rythme mais sans problème la barre des 3200 m d'altitude, ce qui est un bon présage pour l'Altiplano Bolivien.

    05 Cordilière des Andes (2)
    05 Cordilière des Andes

    Nous restons deux jours à Mendoza, le temps de se connecter, de faire quelques courses et de se baigner dans la piscine d'un camping. Nous passerons deux nuits sur le parking d'un Mall, où les policiers nous réservent un accueil bien plus chaleureux que celui du camping, assurant notre sécurité toute la nuit.

    06 Mendoza

    Nous ne prenons pas le temps de visiter la ville parce qu'une autre échéance nous attend : Martin, Ines et leur 4 enfants, une famille franco-argentine rencontrée sur le ferry, nous a invité à passer le week-end dans leur maison de campagne, non loin de Cordoba. Ils ont fait leurs études dans la région parisienne et cultivent l'art de voyager en famille. Même si  nous avions bien sympathisé avec eux sur le bateau, nous ne pouvions pas imaginer l'extraordinaire surprise qui nous attendait...

    Cordoba est une grande ville et il y fait très chaud. Deux raisons pour ne pas nous y attarder.  Nous avons en très peu de temps réalisé l'essentiel des réparation que nous comptions y faire : remplacement d'une batterie, renforcement du bac à douche et réparation du chauffage de la cellule. Nous essuyons un orage sans précèdent. Au bout de 10', nous ne rendons-compte que Chamaco n'est pas tout à fait étanche, mais que les panneaux solaires résistent à des grêlons gros comme des billes. Le lendemain, nous apprenons que l'orage est une tempête d'une rare ampleur qui a causé de gros dégâts matériels et la mort de plusieurs personnes dans la ville. De nombreux axes routiers sont bloqués et la vision qui s'offre à nous est apocalyptique. Chamaco a tenu le coup et en a profité pour pallier à quelques unes de ses faiblesses.

    Nous sommes en début de semaine et sommes attendus vendredi par nos amis. Nous avons 5 jours à tuer et décidons de nous rendre au village de Carlos Paz, où nous espérons nous rafraîchir, car il est situé en bordure d'un lac et dispose de nombreuses infrastructures touristiques nautiques. Un cadre idéal pour fêter l'anniversaire de Marine !

    07 Cordoba

    On se trouve un petit restaurant au bord du lac pour fêter l’événement. A l'issue du repas, nous sommes abordés par un couple. Nous leur racontons notre histoire, comme nous le faisons si souvent. Ils nous proposent de venir garer notre camion dans leur maison pour bénéficier de leur piscine, de leur hospitalité, et de la sécurité de leurs murs. Ils nous donnent des photos de leur demeure pour achever de nous convaincre. Nous les remercions chaleureusement pour leur offre et nous installons pour un bivouac sauvage au bord de lac, le temps d'y réfléchir. Au petit matin, alors que nous faisons l'école, nous sommes abordés par un père de famille et ses deux enfants. Il insiste pour que nous le suivions jusqu'à sa maison, ce que nous acceptons avec plaisir, sidérés par l'hospitalité des habitants de cette région. En France, qui aurait spontanément abordé des étrangers pour leur proposer de venir s'installer chez lui ? Il est propriétaire terrien et élève seul ses deux enfants. Ici encore, les assados se succèdent et il invite ses meilleurs amis en notre honneur. Impossible de songer à participer aux frais !

    Martin nous a envoyé les coordonnées GPS du lieu où nous devons nous rendre. La route la plus directe est sauvage et magnifique. Une vraie route de l'aventure, tout en 4x4. La destination est à la hauteur de la route : une magnifique Estancia nichée au cœur d'un écran de verdure, en pleine montagne. Et au milieu coule une rivière... Le papa d'Ines y élève des « quarter horses » américains. Pour les dresser, il met en place une technique douce, basée sur la confiance et adopte le mode de communication du troupeau à l'état sauvage. Il s'efforce de s'imposer comme le dominant et instaure entre lui et l'animal un lien fort. Son livre, l'Alliance, vient d’être publié. Nous suivons avec passion une de ses séances avec un jeune étalon, et les enfants font des câlins aux poulains espiègles et pas craintifs du tout.

    08 Avec les Gonzales (3)


    Le temps d'un week-end, une véritable amitié s'est instaurée. Nous nous sommes sentis très proches de cette sympathique famille. Nous nous ressemblons. Les garçons partent pour une longue promenade à cheval en montagne. Corentin, qui monte pour le deuxième fois de sa vie est à l'aise et savoure la liberté de galoper en pleine nature. Il fait toujours aussi chaud. Ils laissent leur monture, le temps de plonger au pied d'une cascade perdue. Le soir, un cochon de lait grille dans le four de briques. Des amis sont conviés. On parle toutes les langues de la terre et on savoure le temps qui s'égrenne peu à peu en regardant les étoiles. Le lendemain, on part tous se baigner dans la rivière. Du bonheur distillé en petite monnaie, le plaisir des choses simples échangées avec cœur et élégance.

    08 Avec les Gonzales
    08 Avec les Gonzales (2)

    Retour à Cordoba pour installer le fameux système automatique de gonflage des pneus.

    Depuis Cordoba, nous choisissons de prendre la route de l'Ouest pour le rendre vers Salta. Bien que plus longue, elle semble plus intéressante. Première étape, l'Estancia Jésuite de la Candelleria. L'Estancia, bien de classée au patrimoine mondiale de l'Unesco, n'a présenté que de peu d’intérêts à nos yeux, si ce n'est le chemin pour y accéder, à la fois sauvage et technique. Il a beaucoup plu sur la piste, le rendant très boueuse, ce qui nous permet de tester notre nouveau système, dès le lendemain de son installation. Le jour suivant, nous le cassons sur un rocher !

    09 Estancia la Candeleria

    Le paysage qui suit n'offre peu d’intérêt. Vide et sec jusqu'au parc national de Talampaya, où nous retrouvons des images de Namibie : désertique, minéral, rouge et sculpté. Superbe. Nous refusons de nous offrir une promenade payante en camion 4x4 pour touristes et visiter un canyon. Impression de déjà vu ? Dommage qu'ils n'en autorisent pas l’accès aux véhicules particuliers.

    10 Parc National de Talampaya

    Au matin, nous découvrons une créature inédite installée contre une roue du camion. Une drôle de surprise pour le réveil des enfants !

       

    Nous reprenons la mythique route 40, en direction de Chilecito. Le paysage qui suit est un canyon dans lequel un dégradé de rouge et beige flirte avec le vert, le long de la rivière, en contrebas. Nous en prenons plein les yeux, même si la route est difficile, les croisement dangereux et les bordures vers le vide inexistantes ou mal consolidées.

    12 Sur la route de Chilecito

    D'en haut nous apercevons une piste le long de la rivière qui pourrait faire un bivouac sympa. Nous sommes abordés par plusieurs familles argentines venues se détendre pour le week-end, et en particulier faisons la connaissance d'un homme qui se présente comme le chirurgien chef de service qui a récemment opéré Christina, la présidente de l'Argentine. Tous nous aident à la construction d'un barrage de pierres, à la plus grande joie des enfants qui se baignent maintenant dans une vraie piscine.

    12 Sur la route de Chilecito (2)

    La ville de Chilecito est une ville typique de l'Argentine, avec sa succession de quadras qui s'articulent autour de la place carrée du centre-ville. C'est ici que nous pouvons le plus souvent trouver de l'eau et du wifi gratuit, même si le bivouac est difficile à cause de l'agitation nocturne. Nous partons à l'ascension du Chist Rédempteur local.

    13 Chilecito

    Cafayate est au cœur de vignobles qui lui confèrent un attrait touristique important. Elle bénéficie d'un climat agréable. Nous bivouaquons sur les hauteurs de la ville et entreprenons une longue randonnée, en remontant une rivière jusqu'à la dernière des trois cascades. Nous franchissons de nombreux obstacles dans un paysage digne du Temple du Soleil : cactus géants, grottes derrière les chutes...

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    14 Cafayate
    14 Cafayate (4)

    La route qui sépare Cafayate de Salta est certainement l'une des plus belle du pays. A notre sens, la Quebrada de las Conchas vaut à elle seule le voyage en Argentine. Quoi de plus naturel que d'y rencontrer une Bacotte ? (une habitante de Bois le Roi, notre village de 5000 habitants)

    15 Route 68 (3)
    15 Route 68 (2)

    Bien que frères-ennemis, l'Argentine et le Chili nous ont séduit par la gentillesse de leurs habitants et par leurs paysages à couper le souffle. Ceci-dit, nous ne nous y sommes pas senti aussi dépaysés qu'en Afrique et au Moyen-Orient et ne cessons de nous référer à ces pays qui ont été pour nous si riches en sensations et en émotions.  Après avoir placé plus de 5 mois dans ces pays à la taille de continents, il nous tarde maintenant de passer en Bolivie et au Pérou pour aller à la rencontre de cultures moins occidentales et nous engager dans une aventure plus difficile.

    11 Vieilles Voitures

    A l'heure où nous écrivons ces lignes, nous sommes arrivés à Salta. Nous nous sommes installés dans un camping qui recèle la plus grande piscine que nous n'avons jamais eu et préparons notre camion et un équipage pour nous lancer dans l'aventure de l'Altiplano Bolivien.

    Mais ceci est une autre histoire que nous ne manquerons pas de vous conter !


    A lire : Tintin et le Temple du Soleil
    A voir : L'Homme qui murmurait à l'Oreille des Chevaux


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