• Egypte

    « The Race » ou « La Main d’Allah »

    A Aqaba, le bilan de nos échanges avec les autres voyageurs est clair : la perspective du référendum début Janvier 2011 au Soudan a des chances d’aboutir au scindement du pays en deux nouveaux états. Les risques, au-delà de possibilité de voir les frontières extérieures et intérieures se fermer le temps de stabiliser la situation, ne sont pas prévisibles. Cette possible séparation et les intérêts politiques et économiques qu’elle engendre risque d’amener des soulèvements et des conflits internes.

    Il n’y a donc plus de temps à perdre !

    Notre mission pour les jours à venir : il faut avoir quitté le Soudan en Décembre et au préalable avoir surmonté l’ensemble des pièges administratifs : obtention des visas (considérée comme très difficile) et surtout avoir une place à bord de la seule barge qui traverse, chaque lundi, le Lac Nasser, unique passage possible entre l’Egypte et le Soudan. Les frontières terrestres entre les deux pays est une ligne droite, souvenir d’un partage arbitraire à l’époque de l’hégémonie britannique. Elle est fermée et farouchement gardée.

    Nous avons la sensation d’être au milieu d’un goulot d’étranglement dans notre tour du monde. Si nous réussissons, les plus grandes difficultés qui nous attendront ensuite ne seront plus d’ordre politique, mais maritime dans l’acheminement du bateau d’un continent à l’autre. Si nous échouons, nous devrons faire marche arrière pour progresser en Afrique avec au choix : l’Arabie Saoudite qui, selon nos sources, ne délivre difficilement qu’un visa de transit ; essayer de voir si un cargo peut nous emmener à Djibouti par la mer rouge pour contourner le Soudan et entrer directement en Ethiopie, ou… passer par l’Afrique de l’Ouest, encore plus incertaine côté politique. La France est justement à ce jour en train de rappeler ses ressortissants présents en Côte d’Ivoire.

    C’est donc avec une certaine appréhension que nous nous préparons à pénétrer sur le continent Africain. L’Egypte est considérée comme la tête de pont du monde Arabe et de l’Afrique en même temps. A travers les blogs et récits de voyageurs, les Egyptiens nous sont souvent décrits comme un peuple fier et dur, à l’Histoire plusieurs fois millénaire. Loin de l’accueil qui leur a été réservé en Syrie ou en Jordanie, beaucoup nous relatent des expériences malheureuses où ils avaient la sensation de n’être considérés que comme des portefeuilles ambulants, dans un contexte où la moindre demande de renseignement se négocie, et, dans des cas extrêmes, d’avoir été également victimes d’agressions directes sous forme de jets de pierre. La police est omniprésente pour protéger les occidentaux d’une certaine forme de fanatisme religieux et ainsi maintenir à tout prix cette source importante dans leur économie qu’est le tourisme.

    C’est, habités, par cette idée que nous nous apprêtons à entrer en Egypte. Nous étions loin d’imaginer ce qui allait nous attendre. Mais patience !

    Nous quittons donc Aqaba ce vendredi 19 Novembre. Jouable…

    Il y a deux bateaux qui quittent chaque jour la ville d’Aqaba pour le port de Nuweiba en Egypte. Un à 13h, un autre à 1h. Mais tout cela reste bien évidemment à vérifier sur place, ces horaires n’étant bien entendu qu’indicatifs, un peu comme les TER, mais en un peu plus fiable quand même ! Nous quittons tous nos nouveaux amis dans la matinée pour nous laisser le temps de prendre celui de 13h. Au port, on nous apprend qu’il y a bien deux horaires, mais aussi deux types de bateau. Un rapide (1 heure) et un lent (3 heures).  Or à 13h, c’est le rapide qui part. Pour le lent, il faudra attendre encore une petite quinzaine d’heures ou payer 50 euros supplémentaires.

    Bon si vous avez bien suivi notre récit, vous aurez bien compris que l’esprit de notre voyage est de prendre notre temps et que, par conséquent, l’alternative choisie était d’attendre le lent. D’autant plus que voyager de nuit avec les enfants qui dorment, c’est nettement plus facile. Le luxe suprême n’est-il pas le temps ? Et bien, je suis désolé de vous le dire comme ça à froid, mais vous auriez tord ! Je ne sais pas comment l’expliquer, mais nous avons décidé de mettre la main à notre porte monnaie pour empocher ces quelques heures, uniquement dans la perspective que les jours qui allaient suivre risquaient de ne pas être facile…

    Une fois arrivés au port de Nuweiba au soir de ce même 19 Novembre, c’est la routine qui reprend : achat de devises, obtention de visas, carnet de passage en douane, assurance du véhicule, taxes et bakchichs divers. « Une dernière formalité à remplir et vous pourrez rentrer dans le pays » : une simple vérification du numéro de châssis du véhicule, pour voir s’il correspond bien à celui indiqué sur le CPD (Carnet de Passage en Douane, passeport du camion élaboré par l’Automobile Club du pays de provenance, destiné à dissuader financièrement de vendre le véhicule dans un pays étranger). Il y a plus de numéros sur le papier que sur l’acier. Pour nous, très bien : tous les numéros du camion sont reportés sur le document. Pour eux : pas bon, c’est scientifique, il n’y a pas le même nombre de numéros. Bref nous comprenons que nous ne pouvons pas rentrer pour ces 5 numéros en trop sur un papier. Bon il va falloir s’asseoir. On se prépare à squatter et à discuter. Au bout d’une heure, ils consentent à entre-ouvrir une porte de sortie. Si nous obtenons une lettre de l’Automobile Club de France certifiant que le numéro de châssis sur le véhicule est le bon, c’est gagné. Nous regardons notre montre : il est 18h. Si nous n’obtenons pas notre lettre immédiatement, il faudra attendre lundi dans ce port, soit deux jours.

    Nous obtenons cette lettre grâce à l’aide de Carmen qui a accepté d’allonger sa journée de travail pour nous aider. Jamais nous n’avons eu tant de mal à recevoir un fax ou un email. Au bout de 7 heures de tracas administratifs, nous sommes enfin autorisés à entrer en Egypte. Nous tenons aujourd’hui à la remercier pour son dévouement.

    Nous réalisons avec effroi, que si nous avions pris le deuxième bateau, il en aurait été autrement et nous aurions dû passer le we dans ce poste frontière au milieu des rats et des moustiques, étrange manière d’aborder un nouveau pays. Nous y voyons là un nouveau coup de pouce du destin.

     

    C’est parce que nous doutons de la facilité à obtenir les visas Soudanais que nous décidons de nous rendre directement au Caire. Nous pourrons éventuellement revenir une fois le précieux tampon en poche dans cette magnifique région du Sinaï que nous ne pouvons à ce moment contempler qu’à travers le pare-brise du camion. Nous avalons en une journée les 600 kilomètres qui séparent Nuweiba du Caire et nous arrivons dans la capitale à la tombée du soir. La carte de notre GPS est très approximative et ne nous indique qu’un cap à suivre. C’est donc à l’azimut que nous traversons intégralement de nuit et en camion cette mégalopole de plus de 20 millions d’habitants et qui compte autant de moutons, chars à bœuf, ânes et chameaux. « Crazy Cairo ! ». La conduite ici est très rapide. Elle se fait ici au culot et au klaxon. Les carrosseries souffrent. Les jambes de Laurent ont tremblé encore une heure, une fois arrivés à notre destination.

    « Salma Camping » est un lieu de passage de la plupart des voyageurs au long cours de passage au Caire. Nombre d’entre nous se retrouve ici pour effectuer les démarches administratives nécessaires à la poursuite du voyage.

     

    Nous savons depuis la Syrie que les visas Soudanais et Ethiopiens ne sont pas délivrés aux frontières et que c’est au Caire qu’il faut les obtenir. C’est au Caire également qu’il faut réserver la barge qui nous amènera au Soudan. Nous retrouvons avec grand plaisir Michael et Sabine, couple Allemand qui voyage dans un camion Mercedes, que nous avions déjà croisés à Schneller Schule à Amman, Marc et Brigitte, respectivement Suisse et Allemande, également rencontrés à Amman et qui voyagent en Land Cruiser, ainsi que Gerald et Marlouche, couple Hollandais, voyageant avec leur berger allemand ‘Bronco’ en Combi WV et que nous avons rencontrés à Aqaba. Tous se dirigent vers l’Afrique du Sud. Vous pouvez consulter leurs blogs dans notre rubrique Liens .

    Parce que nous nous entendons tous bien, une équipe de voyage s’organise autour de nos quatre véhicules : faire ensemble les démarches, ainsi que la traversée du Lac Nasser et éventuellement, pour ceux qui le souhaitent, mettre en place un convoi pour la suite de nos aventures dans ce Soudan qui nous fait, à tous, si peur… Un chauffeur de taxi est familier de toutes ces démarches et nous propose à tous, de nous emmener aux différentes ambassades.

     

    Nous irons ensemble pour partager les frais. Première étape nécessaire : l’ambassade du pays d’origine de chacun pour obtenir une lettre de recommandation nécessaire à l’obtention du visa Soudanais. Nous apprenons par le chauffeur de taxi que la France est le seul pays à ne pas vouloir délivrer cette lettre, mais que, en contrepartie, les autorités Soudanaises tolèrent, reconnaissant la fameuse « exception française ». C’est donc sans enjeux réel que Laurent accompagne ses nouveaux camarades de jeux dans notre première journée de tractations diplomatiques.

    En parallèle, Marlouche inscrit l’équipe pour l’embarquement. La date proposée est le 11 Décembre au bureau maritime pour embarquer le 13.

    Nous sommes le 21 Novembre. J-20. La course commence !

    J-19 Nous sommes les seuls à ne pas avoir en main la lettre de recommandation de notre ambassade lorsque nous nous rendons tous à celle du Soudan. Laurent a beau expliquer aux préposés soudanais que la France ne délivre pas cette lettre, leur réponse est sans appel. « No letter, No visa ». Il se précipite donc à l’ambassade de France. « No letter , on ne fait pas ça». Impasse. Retour au camping. Nous finissons par obtenir cette fameuse lettre pour le lendemain, alors que les autres membres de l’équipe ont maintenant un jour d’avance. Un conseil pour les voyageurs : si vous avez l’intention de traverser le Soudan, il faut impérativement faire les démarches de visa depuis la France.

    On profite de notre après-midi pour une immersion dans le ventre du Caire.

     

    J-16 Tous nos visas sont dans la poche. Les Suisses et les Hollandais ont déjà repris la route. Seules les équipes françaises et allemandes restent au camping. Nous ne pouvons pas quitter la ville sans avoir vu les Pyramides. Je vous l’accorde, les photos qui suivent font un peu cliché, mais elles sont incontournables. Estimez-vous heureux de ne pas avoir à subir les inévitables étalages d’épices dans les souks (clin d’œil à une chanson de Bénabar). C’est sur place, devant l’attitude harcelante des vendeurs à la sauvette sur le site, que nous comprenons la réaction de certains voyageurs sur les Egyptiens. On a beau avoir en tête une image assez précise des Pyramides, l’édifice est impressionnant. Nous avons réalisé l’une des priorités de Corentin pour ce voyage. Il n’a pas été déçu. Nous nous sentons submergés par l’Histoire.

     

    J-15 Départ en direction du Sud par la route du désert blanc. Au programme, 1400 kilomètres qui séparent le Caire de Luxor, la route qui longe le Nil étant déconseillée sur le site du Ministère des Affaires Etrangères. Le long de cette route, trois oasis, les trois seuls points où l’eau peut permettre à la société humaine d’exister. Nous retrouvons par hasard, au sortir d’un bivouac Michael et Sabine. Nous décidons de continuer un peu ensemble. Les images qui suivent parlent pour elle-même. Le silence et la monotonie du désert incite à la méditation. C’est calme, c’est beau, ça nous dépasse, ça tranche littéralement avec l’agitation du Caire. Un voyage hors du temps mais dans l’espace, le grand espace.

     

    J-8 Au bout de 1000 km de désert, dans une descente, un gros bruit dans le moteur. Stop. Nous sommes à 60 kilomètres de la prochaine trace de vie humaine. Nous n’avions pas le droit de tomber en panne ici. Cependant, nous sommes sur la route et nous réalisons avec frayeur que si ce problème nous était parvenu une heure plus tôt, nous étions dans le sable, là où jamais personne ne passe. Le plus dur lors d’une panne, au-delà de l’attente et des actions qu’elle nécessite et l’incertitude. Qu’est ce qui se passe ? Comment ? Pourquoi ? Peut-on réparer ? Quelle pièce est cassée ? Existe-t-elle ? Pourrons-nous continuer ? Nous nous asseyons sur le bord de la route et nous attendons. Seuls et avec nos connaissances limitées en mécanique, nous ne pouvons rien faire. Nous sommes à la merci du destin et de ces hommes dont nous ne comprenons pas la langue. Nous sommes vendredi, l’équivalent du dimanche chez nous et nous n’avons plus aucune prise sur les événements.

    Une patrouille de police passe et s’arrête. C’est la police de la route. Ils restent quelques heures avec nous, le temps de confier le dossier à la police du tourisme. Nous passons la nuit au bord de cette même route, réveillés toutes les demi-heures par un camion qui passe en trombe, faisant trembler Chamaco, un homme en civil et armé veillant dans la cabine. L’objectif est d’obtenir une barre de remorquage et d’arrêter un camion qui accepte de nous tirer jusqu’à Al Kharga, le prochain oasis. Nous y parvenons à la tombée de la nuit suivante et abandonnons le camion aux mains du garage local qui s’active à démonter chaque pièce du moteur jusqu’à minuit. Cette nuit encore, nous allons peu dormir.

    J-6 Le garagiste nous fait comprendre que c’est grave. Alors que nous pensions à un joint de culasse, il évoque un problème de bielle et de pistons cassés. Bien évidemment non disponibles dans le désert... Il se propose de se rendre lui-même au Caire pour gagner du temps. Nous acceptons, tout en lui donnant trois jours maximum pour tout réparer. Il est confiant. Oublié, Louxor ! S’il tient son engagement, il nous restera ensuite 2 jours pour couvrir les 600 km qui nous séparent maintenant d’Assouan. Nous sommes toujours dans la course ! Nous choisissons d’attendre la suite des événements dans un hôtel de l’oasis. Dans la soirée, nous faisons la connaissance de Mohsan, le Directeur de l’Agence de Tourisme locale à qui nous racontons notre histoire.

    J-5 Mohsan nous retrouve dans l’hôtel. Il nous explique avoir compris notre détresse. Nous ne pouvons pas confier notre destin à ce seul garagiste et il se propose de nous aider. Son fils est au Caire et va également faire le tour du marché local pour essayer de trouver les pièces. En parallèle, Laurent doit l’accompagner. Ils vont essayer de se mettre en relation avec Renault Truck au Caire. Ensemble, ils passeront une bonne partie de la journée au téléphone, mais repartent avec le numéro de portable d’un certain Mohamed Mostafa, directeur technique qui accepte de nous aider. Dans notre hôtel, confrontés à l’impuissance, au doute et à l’incertitude, nous nous posons pour réfléchir. Une  boîte de transfert, un moteur… Et ensuite ? Quelle sera la prochaine  panne ? Allons-nous devoir subir ces problèmes mécaniques tout au long de notre voyage ? Allons-nous rester à la merci de ce camion ? Rentrer en France ? A aucun prix. Nous contactons même divers fournisseurs en Europe susceptible de nous livrer un nouveau camion très rapidement pour nous permettre de poursuivre notre voyage. Nous avons conscience que c’est de la poudre aux yeux, mais ça nous permet de positiver et d’avancer.

     J-4 Mohsan propose d’aller ensemble voir le garage, histoire de leur mettre un peu la pression. Il est inquiet, car la personne qui est partie au Caire ne lui répond pas au téléphone. Nous sommes impressionnés, tant son implication dans notre problème est sérieuse. Nous apprenons que la personne a fait choux blanc. La seule issue possible désormais : amener le camion au Caire le plus rapidement possible. Nous réaliserons que nous ne seront pas à Assouan à temps. Nous écrivons à la compagnie maritime pour leur demander de repousser notre réservation à la semaine prochaine et expliquons la situation à nos compagnons de voyage. De J-4, nous passons à J-11…

     J-10 Mohsan a trouvé le moyen de nous emmener au Caire. Nous allons poser Chamaco sur un autre camion. Deux chauffeurs se relaieront toute la nuit et nous resterons dans le camion. Nous prendront la route du Nil, directe jusqu’au Caire. Il nous assure que nous serons au petit matin chez Renault Truck. On est attendu, ils connaissent la situation. Il leur a déjà  tout expliqué. Ils feront vite. Mohsan s’occupe de tout. Il se démène, se bagarre. Fonctionnaire, il n’a rien à gagner à nous aider et fait preuve de ressources inépuisables. Sans lui, nous serions perdus dans ce pays, sans la possibilité d’y rester, ni d’y sortir, car liés au sort du camion à cause du CPD. Il organise le moyen de charger Chamaco sur le porteur.

     

    J-9 Nous sommes de nouveau au Caire. Nous avons passé la nuit dans un camion, lui-même posé sur un autre camion. Nous avons progressé de 600 km sur une route parfois très difficile. A la fois inquiets sur notre sort et effrayés, nous n’avons pas dormi de la nuit. Nous nous sentions tels des funambules sur un câble, susceptibles de basculer à tout moment dans le gouffre. Nous faisons la connaissance de Mohamed Mostafa, Ingénieur et directeur de l’atelier qui nous apprend que deux de ses hommes sont déjà en train de chercher les pièces. Il nous assure de mettre tous les moyens possibles pour que nous puissions repartir au plus vite, tout en soulignant la difficulté du problème et la gravité de la panne. Le soir même, il nous amène dans un hôtel au centre de la ville. En route, son téléphone sonne : 70% des pièces manquantes ont déjà été trouvées ! Ce sont des pièces turques qu’il faudra usiner pour les adapter au moteur Renault, mais ça ira… Il ne nous reste plus qu’à attendre maintenant… Nous restons 3 jours dans cet hôtel où nous faisons la connaissance avec une famille belge qui voyage en Afrique avec 5 enfants dans un camion Iveco. De nouveau, vous pourrez consulter leur lien dans notre rubrique Liens  

    J-5 Mohamed Mostafa vient nous chercher à l’hôtel. La réparation est terminée ! Le moteur tourne, mais sous surveillance continue, tel un patient convalescent. Nous apprenons que le capteur de température du moteur était défectueux. Nous avons roulé dans le désert sans nous rendre compte que le moteur surchauffait. Le problème n’arrivera plus, la cause n’est pas due à une erreur de notre part. Nous reprenons petit à petit confiance avec le camion. Le camion doit cependant rouler à l’arrêt pendant longtemps pour que les nouvelles pièces prennent leur place. En même temps on contrôle en permanence la température. On pourra dormir dans le camion pendant cette période, mais il faudra subir ce moteur en marche et en plus l’éteindre, chaque nuit, entre 1h et 3h du matin ! Tout ce temps, Mohamed Mostafa n’a cessé de faire preuve d’attentions délicates, faisant honneur à l’hospitalité Egyptienne !

     J-3 250 kilomètres de rodage que Laurent réalise avec les ingénieurs, pendant que Virginie s’occupe de rassembler le liquide pour payer le garage. La somme est honnête, mais dépasse nos capacités de retraits hebdomadaires. Il nous manque 500 euros! Nous ne pouvons plus attendre. Mohamed Mostafa nous laisse partir, mais nous devrons emmener à bord un mécanicien, chargé de relayer Laurent au volant la nuit et surtout de récolter la somme manquante à la prochaine ville.

    Il est 18h quand nous quittons le garage. Au premier virage, c’est un flexible d’embrayage qui éclate. Mohamed a juste le temps de rouvrir le garage de d’appeler ses fournisseurs locaux pour leur demander de rester ouvert encore une heure ou deux. Il ira lui-même chercher puis usiner la pièce qui manque. Il dit à Laurent: « Quand j’ai vu pour la première fois l’âge du camion et l’étendue de tes connaissances en mécanique, j’ai pensé que tu ne finiras jamais ton tour du monde. Maintenant, je sais que tu y arriveras, car la chance est avec toi ! »

    22h. Nous sommes repartis. Au bout de 10 km, le nouveau témoin de température moteur monte en flèche. C’est une durite qui a sauté. Le mécanicien répare ça en 5’. Le téléphone de Laurent sonne. C’est Mohamed Mostafa : « Tu te rends compte que si tu m’avais payé l’intégralité de ce que tu me dois, tu n’aurais pas eu de mécanicien à bort et tu n’aurais jamais été à temps pour ton bateau? » Une telle question nous donne le vertige.

     J-2 après avoir roulé toute la nuit, nous faisons une hâte à la ville d’Assiout. Nous devons à tout prix trouver la somme qui manque si nous ne voulons pas devenir les otages de notre mécanicien. Après avoir fait toutes les banques de la ville, nous comprenons que nous n’obtiendrons plus de liquide, quel que soit le montant disponible sur nos comptes. Virginie eut une idée de génie : et si nous regardions du côté de Western Union ? Le papa de Laurent peut à distance et de manière instantanée nous verser à partir de son ordinateur une somme en liquide dans un guichet local, présent dans tous les coins de la terre. Le plafond, sans qu’il ait lui-même à se rendre dans un bureau de poste, est de 500 euros, la somme qui nous manque. Nous sommes sauvés !

     J-1 Nous arrivons à Assouan dans la soirée. Nous retrouvons dans un camping Marina, Roger, Sylvie et Niel deux couples en voiture que nous avons rencontrés à Aqaba. Comme toujours, vous pourrez retrouver leur blog dans notre rubrique Liens . Nous faisons la connaissance d’autres voyageurs avec qui ne ferons également la traversée.

    Jour J ! Nous sommes à la première heure devant les bureaux de la compagnie maritime. Nous sommes biens prévus pour le prochain départ dans deux jours, le temps pour nous de réaliser toutes les formalités de sortie. Nous devrons cependant payer une amende pour être restés en Egypte deux jours de plus que ce que le visa nous  le permettait.

    Nous avons gagné !

     

    Nous apprenons qu’une tempête de sable a frappé la barge de la semaine précédente  et que les amis avec qui nous avions prévus de traverser ont dû rester 4 jours à bord au lieu de 1, dans des conditions abominable. Nous apprenons également qu’il est possible d’obtenir facilement le visa soudanais à Assouan et que la lettre de recommandation n’est pas demandée ! C’est aussi ça le voyage. Il nous amène à élaborer une stratégie sur une rumeur, un mythe.

    Cela fait maintenant plusieurs semaines que nous n’avons pas fait l’école. Nous attendons avec impatience de pouvoir nous poser un peu, histoire de faire une lessive, de remplir la citerne d’eau et de se connecter. Toutes ces petites choses qui pour vous sont si simples, mais  qui nous demandent à nous de soulever des montagnes !

    Et dire que certains d’entre vous pense que nous sommes en vacances…

    La traversé du Lac Nasser s’est déroulée sans difficultés.

     

    Nous avons pu admirer de loin le temple d’Abou Simbel, sauvé des eaux avant la création du barrage d’Assouan.

     

    On quitte petit à petit le monde arabe pour s’enfoncer progressivement au cœur de l’Afrique.

    Un dernier mot avant de vous quitter sur l’Islam, que nous avons appris à mieux connaitre depuis la Syrie. Nous avons été impressionnés par la piété des arabes et par la place que Dieu prend à chaque moment de la journée. La volonté et les efforts des hommes ne sont que peu de choses. Seul Dieu permet la réussite ou l’échec d’un projet. L’Islam est une philosophie et un art de vivre au quotidien. Il coule dans les veines de toutes les personnes que nous avons croisées dans les trois derniers pays traversés. La vie s’arrête 5 fois par jour au moment de la prière et les tapis se déploient dans la rue et sur les trottoirs. Les hommes ont le front marqué à force de se prosterner et espèrent ainsi que Dieu les reconnaitra au paradis. Ils cherchent à accumuler des crédits pour leur seconde vie, ce qui en fait un peuple d’une rigueur de vie, d’une discipline, d’une humilité, d’un sens de l’hospitalité et d’un dévouement extraordinaire. Leur limite : bien qu’ils tolèrent les autres croyances et acceptent de nous faire partager la leur, ils poursuivent tous une mission à travers laquelle, par leur mode de vie, ils se positionnent comme un exemple dont le but avoué est d’amener la conversion. Le mégaphone annonçant l’appel à la prière de 5 heures du mat sur le pont du bateau sur lequel nous dormions a tout de même été vécu difficilement !

     

     

    La Main de Dieu a bien été sur nous en Egypte. Elle a permis que le voyage, malgré les difficultés, puisse se poursuivre au Soudan. Les hommes n’y sont ils pas également pour quelque chose ?

    Mais ça c’est une autre histoire… On essaiera de ne plus vous  parler de garage ! Qu’est-ce qu’est bon maintenant de ne plus avoir d’échéance !

     

    Du fond du cœur, nous vous souhaitons à tous une très bonne année 2011. Puisse-t-elle vous permettre de rêver et de réaliser vos rêves.

    PS – pour ceux qui ne l’ont pas encore, fait, ne manquez pas de vous inscrire à notre newsletter !


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  • Commentaires

    1
    Salsita
    Samedi 1er Janvier 2011 à 18:46
    Waou! Que d'aventures! Mais c'est aussi ce qui fait que j'aime toujours autant vous lire ; je câle ma respiration à votre récit, et je peux vous dire qu'elle s'est presque stoppée plus d'une fois lors de cette dernière lecture lol!
    Merci de partager avec nous cette belle aventure.
    Une Bonne Année à tous les 4 en tous cas.
    Delphine
    2
    Yann
    Dimanche 2 Janvier 2011 à 08:46
    Salut les amis, je vous souhaite tout d'abord mes meilleurs voeux à vous 5 pour cete année 2011. Cela fait plaisir de vous lire, que d'aventures sur ces terres égyptiennes !! J'espère néanmoins que le camion a fini sa période de "rodage", et qu'il vous laissera avancer sur un rythme un peu moins stressant que vous puissiez profiter différemment de l'hospitalité des gens que vous rencontrez.
    Je vous embrasse fort et espère retrouver de nouveaux récits rapidement !! :)
    3
    Tribu Plapla
    Dimanche 2 Janvier 2011 à 17:55
    Merci pour ce voyage par procuration !
    Bonne année 2011 à vous 5 !!!!!
    Gros bisous
    4
    philounass
    Dimanche 2 Janvier 2011 à 22:49
    L'homme voyageur acquiert forcement une profondeur d'âme sans aucune mesure avec celle de l'homme occidentale, éssouflé par le rytme de vie, assailli par le visuel, les sons,les idées assénées comme seul vérité, engloutis sous les clichés, une réussite sociale qui serait l'échelle du bonheur. Sous ce vernis, sous cette cascade ininterrompue qu'il ne peut contrôler, sous cette fureur et ce bruit comment pouvait-il égaler l'homme des sables.
    A VOUS: Les Philounass
    5
    Laurette
    Lundi 3 Janvier 2011 à 15:13
    J'ai déjà du le dire mais je le redis: vos récits sont époustouflants!!! Quel plaisir de vous lire, même dans les méandres techniques, je ne décroche pas! Merci de nous faire partager cela!
    Je vous souhaite une Belle année 2011, pleine de Joie, de Grâce et d'émerveillement!!! Et ça m'a l'air bien parti!
    Bise parisienne
    Laure Daq
    6
    Laurent
    Lundi 3 Janvier 2011 à 18:47
    Salut les chamacos
    Super votre récit sur les petits soucis égyptiens ... Bonne route au Soudan !
    Ça été bien sympa de faire route ensemble ... A la prochaine sur les pistes ... Inch Allah!

    Les septavivre.
    7
    mima
    Vendredi 7 Janvier 2011 à 11:52
    quel merveilleux moment je viens de passer en votre compagnie !!!!!!!! tout simplement fabuleux - j'espère que tout se passera bien pour vous au Soudan et que d'autres belles aventures vous attendent et surtout que le camion vous laisse un peu de répit - je vous embrasse très, très fort - que Dieu vous garde !!!!!!!!!!! mima
    8
    Markus
    Vendredi 7 Janvier 2011 à 18:36
    Bonne et heureuse année à toute votre famille.
    Vous m'avez mis dans une telle incertitude avec votre panne de camion que j'en suis encore tout retourné. Très jolies vidéos et surtout avec la musique c'est génial.
    Bonne continuation et ro bisous aux enfants.
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    9
    Patrice
    Samedi 8 Janvier 2011 à 14:56
    Bonjour,

    Merci de m' envoyer vos news letter.

    Je suis très passionné de suivre votre voyage.

    Patrice Vogel
    10
    Alain
    Dimanche 9 Janvier 2011 à 20:03
    Bonjour à tous,
    C'est avec grand plaisir que je vous suis, de temps en temps, sur votre blog.
    Quelle mine de renseignements. Merci !

    J'ai aussi le projet de partir en camion.... et un peu le même périple que vous en tête.
    J'ai acheté un Man 10.224 que je suis en train de transformer.
    Vous pouvez le voir sur Facebook ; alain Sieben.
    Départ prévu en septembre 2011. Durée inconnue.

    Bon ! Je mets le turbo pour les travaux et je vous rejoins ! ;o)

    Au plaisir de vous lire encore ... et encore et peut-être de vous croiser, un jour, sur les routes.

    Bonne chance. Take Care !

    alain
    11
    chamois
    Jeudi 13 Janvier 2011 à 17:13
    Meilleurs voeux à toute la petite famille et continuez à nous faire partager votre voyage comme vous le faites c'est à dire avec votre coeur. Que tout ce vécu, ces situations et ces circonstances vous amènent à l'accomplissement de la Vie. Je crois que vous l'avez déjà un peu saisi, Dieu habite dans les hommes et c'est tout simplement là que s'exerce la connaissance divine, la foi et la confiance. Alors, soyez bénis et enrichis comme vous nous enrichissez dans vos récits. De tout coeur.
    12
    loic
    Vendredi 14 Janvier 2011 à 14:09
    gémial ce récit nous tiend en haleine ,continuez de nous faire réver
    bises
    Camille
    13
    martine et G
    Samedi 15 Janvier 2011 à 19:58
    A la fin de ton tour du monde tes connaissances en mécanique seront au top. Pas de chance mais Allah veille sur vous car vous avez toujours trouvé pour réparer et continuer. Toujours de belles photos, bonne continuation.
    14
    jo5468
    Dimanche 30 Janvier 2011 à 11:17
    Heureusement, vous n'êtes plus en Egypte à ce moment-ci !
    Bonne continuation !

    Jos
    15
    alanatha
    Lundi 31 Janvier 2011 à 03:46
    Hello les chamaco,

    Excellent la leçon d'arabe sur le net ;-) Pas facile, dis donc !
    Comme d'habitude, vos photos sont superbes ! Espérons que nous nous croiserons en Afrique en fin d'année.
    Gros kiss à tous les 5,

    Nath et Al
    www.imagineagreenworld.kazeo.com
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