• Moyalē est un village à la frontière entre l’Éthiopie et le Kenya. Nous y croisons une famille hollandaise en Land Rover qui remonte dans l’autre sens. L’échange fut bref car ils étaient sur le point de quitter l`hôtel où nous nous apprêtions à bivouaquer. Juste le temps pour nous d’apprendre que le bitume s’arrête ici, et que leur vitesse était de 20 km par heure (information que nous avons reçu avec le sourire, notre camion étant tellement plus fort qu’une vulgaire voiture!), juste le temps pour nous de leur annoncer qu’ils ne pourront pas réparer leur véhicule avant Addis-Abeba.

     
    Réparer? Vous avez dit réparer?
     

    On se renseigne auprès du directeur de l`hôtel qui nous affirme que la route n’est pas revêtue, mais qu’avec un camion tel que le nôtre, à la vitesse de 40 km par heure, nous devrions atteindre la ville de Marsabit qui est à 250 km au bout d’une journée de piste. Le reste n’est ensuite que du bonheur!
     

     

     C`est donc en toute confiance que nous nous engageons sur l`A2, l’autoroute qui relie les deux pays, la seule route possible quand on ne veut pas passer par le Sud Soudan ou la RDC pour se rendre dans les pays d’Afrique de l`Est et du Sud. Il est 10 heures du matin, les formalités à la frontière ayant été simplissimes… Nous n’imaginions pas qu’au-delà de cette ligne, c’est l’enfer qui nous attendait.


    L’autoroute s’est avérée être une bande de pierres au milieu du désert. Aux pierriers se sont succédées des zones de tôle ondulée. Nous qui ne connaissons du 4x4 que la glissade souple dans le sable du Wadi-Roum ou du Désert Blanc, notre moral, nos nerfs et le camion ont été soumis en quelques heures à l’épreuve du feu.
     

    Notre progression est lente. Beaucoup trop lente. Pour tenter de limiter la casse, nous avançons à la vitesse de 10 km par heure, bien au deca de ce qu’on nous avait annoncés. Et comment ils font ces camions locaux, chargés de marchandises et de passagers qui nous dépassent à la vitesse de 60 km/h dans un nuage de poussière et une volée de cailloux? Ils semblent voler, ne pas toucher le sol. Ils semblent engloutir, absorber la piste. Une ancienne image d’un film français en noir et blanc nous vient à l’esprit. Sur la tôle ondulée, il faut aller vite, le seul moyen d’annuler les chocs et les vibrations.
     

    C'est pire. Bien pire! Le camion semble se démanteler. Entre risquer de passer plusieurs jours dans cet enfer ou de casser notre Chamaco, le choix est vite fait. Virginie se propose de prendre le volant. Nous nous relaieront tous les 10 kilomètres, soit toutes les heures!
     

    Au bout de quelques heures, une lampe s’allume sur le tableau de bord. L`air. Une pierre a endommagé l’alimentation principale du camion. En attendant de pouvoir réparer au prochain garage, c’est sans freins à main, ni frein de parking, ni klaxon (mais ça on s’en fiche, il n’y a personne ici) que nous allons devoir poursuivre notre route. Le téléphone satellite sonne pour la première fois depuis notre départ de France. C`est Péric, le papa de Laurent, inquiet de ne pas avoir de nouvelles. Nous expédions la conversation, non seulement parce que nous sommes focalisés par la route et nos problèmes mécaniques, mais surtout parce que nous savons à quel point ces communications sont chères.
     

    A l’issue de cette journée, nous n’avions progressé que de 120 kilomètres, la moitié de ce à quoi nous nous attendions. Il est 18 heures quand nous nous arrêtons, fourbus, dans un village de nomades. Une heure après avoir arrêté le moteur, nous ressentions encore les secousses et les vibrations du camion au bout de nos membres et dans le dos. Inutile d’espérer pouvoir réparer notre système d’air ici, il n’y a rien. Nous tentons d’assister des policiers en Land Cruiser qui ont cassé leurs suspensions qu’ils tentent de réparer avec des moyens rudimentaires. Nous faisons connaissance avec les habitants qui se montrent accueillants tout en restant distant et respectueux. Les enfants, tout sourires, s’approchaient, curieux, mais détalaient dès que nous leur tendions la main. Le Blanc semble rarement s’arrêter dans cette région…
     

    Une deuxième journée de route s’annonce. Sous notre fenêtre, les bergers égorgent des moutons pendant notre petit déjeuner. C'est avec une immense appréhension et une boule au fond de la gorge que nous enlevons les calles sous le camion et nous nous installons au volant. Nous suivons le rythme de la veille : on change toutes les heures, tous les 10 km. Tous les 10 km précisément, car lorsqu’on conduit, on en est vraiment à 100 mètres près. Les enfants réagissent très bien et deviennent également les acteurs de cette aventure, sans (trop) se plaindre des secousses. Régulièrement Corentin égrène la progression. Ce n'est pas possible! Nous n’avançons pas! Nous avons les yeux accrochés à un GPS qui semble figé.
     

    Les heures s’égrènent à ce rythme. Le camion fait de plus en plus de bruit. Cela semble venir du réservoir de gasoil qui doit cogner contre la carrosserie. D'ailleurs la porte d’accès commence à se fissurer… Nous finissons par gagner la ville de Marsabit. Bière fraiche et mécanicien qui s’active sur le système d'air contribuent à nous remonter le moral.
     

    Sans pour autant offrir le bitume promis à Moyale, la route qui quitte Marsabit est agréable, lisse et fluide… au moins pendant les 50 premiers kilomètres! Puis c'est l'enfer qui recommence. La bonne nouvelle, c'est que le route qu'il nous reste à faire est moins longue maintenant que celle que l'on a déjà couverte jusque-là. Maintenant, chaque mètre parcouru nous rapproche de l'issue. Nous sommes condamnés à en sortir. Nous choisissons les pierres, consentons à en écraser les plus petites pour éviter celles qui nous semblent les plus grosses. C'est un peu comme une loterie. Il en va de même pour les trous. La solution la plus intéressante consiste à avoir deux roues dans le fossé, plus lisse, afin de mieux répartir les vibrations et tenter de gagner un peu de confort.
     

    Un point positif. La ville de Marsabit est au milieu d'une réserve. La route nous donne l'occasion d'admirer des babouins, un groupe de vautours affairés sur la carcasse d'une gazelle et de faire la connaissance avec la tribu des Borana. C'est notre troisième jour sur cette route. A la nervosité s'ajoute maintenant la fatigue.
     

     
     

    Puis soudain, vers 16h Corentin pousse un cri : ``Regardez!``. Une gazelle? Un autre suricate? Une autruche? Non. La route. LA route. Noire et neuve. Une route que les chinois viennent de finir et que nous sommes parmi les premiers à emprunter. Nous notons les coordonnées GPS. Au total nous aurons parcouru 404 kilomètres de cet enfer et je vous jure, ces 4 kilomètres additionnels comptent. Nous n'arrondirons pas.
     

    Il est tard quand nous parvenons à la ville d'Isiolo. Nous nous faisons remettre en place par la police touristique. Mais qu'importe. Nous avons gagné! Nous décidons de nous offrir une nuit dans un bel hôtel de la ville, ainsi qu’un bracelet Borana, qui signifie à nos yeux que nous avons gagné nos premiers galons d'aventuriers. Ça peut paraitre ridicule, mais pour nous c’est porteur de sens. Nous savons que nous avons maintenant fait le plus dur de notre aventure, dont nous pouvons maintenant pleinement savourer. Ce bracelet symbolise la fin d’un itinéraire rectiligne, nécessaire et imposé par des raisons diplomatiques et administratives pour laisser la place à l’aventure et à l’improvisation. C'est ce que nous ont également confirmés les autres voyageurs en provenance d’Afrique du Sud que nous avons rencontré à Nairobi. Les kilomètres que nous avons couverts jusqu'à la capitale du Kenya ne sont qu'anecdotiques, si ce n'est la rencontre avec nos premières girafes.

    Nous avions l'intention de nous rendre à Jungle Jonction, point de convergence entre tous les overlanders qui voyagent en Afrique où nous devrions pouvoir réaliser toutes les améliorations à apporter au camion, suite à notre expérience de maintenant 7 mois sur les routes.
     

    Notre arrivée à JJ a été saluée par une bande de copains français rencontrés au Caire, puis recroisés au milieu du Désert Blanc, alors que nous attendions des secours. Ils avaient eu vent que notre aventure s'était arrêtée là. Nous avons également retrouvés d’autres aventuriers rencontrés à différentes étapes de notre voyage. Pour tous, notre arrivée a été une heureuse surprise. Nous avons fait la connaissance de la famille Coussinié qui voyage depuis 2 ans en Amérique et en Afrique en B90. Comme d'habitude, vous pouvez retrouver leur blog dans notre rubrique Liens. Les ``8 Semelles de Vent`` nous ont réservés un accueil extraordinaire et nous ont éblouis par tout ce que le monde moderne peut offrir, ici, à Nairobi. Nous étions depuis si longtemps sur les routes, que nous n'avions pas pris conscience que nous avions progressivement, renoncé petit à petit au confort, que nous glissions vers le dénuement; les pays traversés offrant successivement une douce transition vers un monde toujours plus pauvre et plus difficile. Le passage de cette route infernale à un hypermarché ultra moderne a été vécu comme un choc électrique, une décharge aveuglante. Nous avons frénétiquement remplis notre camion de fromages, de saucissons, de pastis, d`habits, et autres accessoires qui nous ont tant manqué, sans que l’on en s’aperçoive.

     

    A notre arrivée à JJ, nous avons également petit à petit renoué avec les communications. C'est alors que nous avons appris, que, suite à son bref appel sur le satellite, Péric s’est ensuite renseigné sur la route. Sans le savoir, nous avions emprunté le cauchemar des aventuriers. Un bref appel à l'Ambassade de France à Nairobi a confirmé ses doutes. Cette piste est non seulement très mauvaise et déconseillée comme telle, mais surtout l'Ambassade préconise des déplacements en convoi armés pour faire face aux bandits. Il a tenté de nous rappeler pour nous prévenir. Notre satellite était alors sans batterie. Panique à bord! Il a ensuite rappelé l'Ambassade pour exprimer ses craintes, qui a elle-même tenté de nous contacter… bien évidemment en vain! Nous avons dû justifier auprès d'eux pourquoi notre satellite était inactif et nous promettons dès à présent à maintenir coûte que coûte la liaison avec Huston!
     

    Et le camion, me diriez-vous? A l`heure où nous écrivons ces lignes, nous sommes toujours à JJ, et ce depuis 3 semaines maintenant. Chamaco subit une révision générale, car ici nous profitons des prix et des compétences de l’Afrique avec la disponibilité des produits modernes. Nous refaisons et optimisons toute l’électricité dans la cellule, nous mettons en place des rangements extérieurs sur mesure et surtout nous essayons de rendre l’ensemble du camion plus solide et moins exposé. Tout ce qui dépasse a souffert, depuis le store, jusqu'à l'échelle coulissante (Gérard, si tu nous entends…). Nous essayons de faire au plus simple, comme deux barreaux que l'on range derrière la porte pour remplacer l'échelle. Les suspensions du réservoir installé en Jordanie, bien qu'adéquates sur nos routes, n'étaient pas suffisantes pour cette fameuse piste. Le réservoir a non seulement tapé sur le châssis jusqu’à le fragiliser, mais a également cogné contre une vis. A peu de choses près, il aurait été percé et tout notre diesel se serait répandu sur cette route maudite…
     

    Depuis que nous sommes à JJ, nous avons retrouvé presque tous les voyageurs rencontrés jusque-là (enfin ceux qui avaient l'intention de venir en Afrique!) et nous avons croisés beaucoup de personnes en provenance du Sud, pour qui l'accès à l’Éthiopie, au Soudan et à l’Égypte sont maintenant impossible. Nous avons l'impression de vivre un grand rassemblement familial!
     

    En attendant, nous ne sommes pas restés inactifs, ici à Nairobi… Nous serons en mesure de vous montrer des images du Massai Mara prochainement. Vous ne verrez pas le Renault féroce, mais son cousin…
     

    Nous récupérons Chamaco cette fin de semaine et reprenons notre route cette fin de semaine. Mais ceci est une autre histoire!

    A voir – Le Salaire de la Peur!!!


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  • Nous poursuivons notre voyage à travers le temps.

    Après la traversée de la France, berceau de notre famille, de la Grèce et du monde méditerranéen, berceau de la culture européenne et de notre monde occidental; après avoir remonté le Nil, dans les pas d`une civilisation plurimillénaire, nous parvenons dans ce pays dans lequel les archéologues ont découvert Lucy, longtemps considérée comme la doyenne de l`Humanité. La religion dominante est l’Église Orthodoxe d’Éthiopie, une des plus anciennes communautés chrétiennes du monde.

    Avant de commencer notre voyage, nous avions en tête ces images d’enfants que les medias nous relayaient dans les années 80 : ces enfants mal nourris au ventre trop rond, aux membres squelettiques, n`ayant plus la force d`écarter les mouches qui viennent en nombre envahir leur visage, ces enfants pris en photo dans le sable à proximité des tentes de fortunes mises en places par les associations humanitaires… Vous vous en souvenez?

    Avant de pénétrer dans le pays, nous en avions une autre image, à travers les yeux des voyageurs. Le pays est aussi beau que les Soudanais sont accueillants; ses habitants sont aussi durs que le Soudan est sec.

    Notre premier contact avec le pays est des plus sympathiques : ``Bienvenue dans un monde libre!``, nous annoncent les guides chargés de nous simplifier dans nos démarches à la frontière de Metema. Qu`est-ce qu`elle est bonne cette première gorgée de bière glacée, cette bière que nous pouvons maintenant acheter au coin de la rue, sans avoir à traverser Aman pour la dénicher, ni  à la négocier au marché noir à un prix exorbitant, dans le coin d`une rue sombre d`Assouan!

    Le temps d`un simple pont, et nous passons d`un climat désertique à un climat montagnard.

    Nous profitions de l`excitation du moment pour demander un plein de la tonne d`eau, geste pour nous à la fois banal, mais tellement porteur de sens. 30 euros! Il semble que dans ce pays qui est l`un des plus pauvres du monde, l`eau soit la plus chère du monde!

     

    Le paysage qui suit est époustouflant : un paysage de Savoie ou de Franche-Comté avec ses champs, ses sapins, ses plateaux et même ses chalets de bois .Seule la couleur des habitants change… Deux éléments toutefois nous surprennent : l`absence totale de plastique. Ici tout est naturel et tranche radicalement avec ces sacs, ces bouteilles et autres immondices qui faisaient notre quotidien depuis si longtemps. Ici, tout est bois, terre et naturel.

     

    Nous déroulons nos premiers kilomètres. Au bord de la route, il y a énormément de monde. Ici on marche. Hommes et femmes mènent leurs troupeaux de vaches, ânes, de chèvres et de moutons, enveloppés dans leur couverture de couleur vive, un long bâton de marche à la main. On marche par deux, dix, cent. On transporte du bois, de l`eau.

     

    Nous ne faisons pas 50 mètres sans rencontrer ce grouillement de vie. Et des enfants! Des enfants partout! Des enfants en bande, sans adultes auprès d`eux, quelquefois à plusieurs dizaines de kilomètres du village le plus proche. Il y a tellement de monde que la conduite en montagne en devient difficile. Les descentes se font à toute petite allure, sous le rugissement du frein moteur, pour éviter de toucher qui que soit. Virginie se fait la remarque : ``on assiste à un exode!``

    Nous ne laissons personne indifférent. Les enfants dévalent les collines en nous apercevant, pieds nus dans les graviers, tels des cabris. Nous avons en l’impression d’être des coureurs du Tour de France sur le point de franchir ce Galibier, et ce, de manière continue, sous le son des `Franje` et des `you-you`. La main qui se lève en signe d`accueil devient très rapidement une main qui se tend pour réclamer de l`argent, une bouteille de plastique qu’ils vont pouvoir recycler, voir même de la nourriture, quand ils la portent à la bouche.

     

    Nous apprenons que `Franje` est le mot générique qu`ils utilisent pour designer, l`occidental, le blanc, le ``français``, en relation directe avec la présence française à Djibouti, non loin. Les  `you-you` font référence à la manière dont les contremaitres chinois les interpellaient lors de la construction des routes. ``You! You do this!``. L`amalgame est vite fait. Il n`est pas rare qu`on nous appelle également `Chinese`.  ``You! Chinese! You!``.

    Cela illustre à nos yeux que leur attitude vis-à-vis de l`Étranger est difficile. Les Ethiopiens, en plus d`avoir leur propre langage, l`Amharique, se font un point d`honneur d`être le seul pays d’Afrique à n’avoir jamais été colonisé. Ils ne savent pas comment réagir devant le blanc qui s’est trop longtemps manifesté sous les traits d`une ONG leur distribuant argent et produit de première nécessité.

    La traversée des villages se fait dans un même climat d`excitation et notre passage ne passe jamais inaperçu. Dans un tel contexte, nous avons du mal à nous arrêter. A la moindre halte, nous sommes assaillis par des dizaines de personnes qui ont toutes quelque chose à proposer, à vendre, où à réclamer, quand ils ne sont pas simplement là à nous observer comme si la grande parade du cirque passait aujourd`hui et pour la seule fois de l`année dans le pays. Nous faisons l`objet de discussions animées, ce qui nous donne la désagréable impression d’être une marchandise ou un objet de convoitises. C`est dans un tel climat que nous roulons, les yeux fixes, droit devant nous.

    A un moment donné, la route est déviée sur une piste dans laquelle il y a une rivière à franchir, pour permettre la construction du pont. Nous nous engageons prudemment sur le gué, à proximité des locaux qui lavent leur linge et leur voiture. Un homme se lève à notre passage et brandit à bout de bras une énorme pierre en direction de la fenêtre du passager. Virginie, terrorisée tente un vain réflexe de survie et se précipite pour refermer sa fenêtre. L`homme repose sa pierre, mort de rire.

     

    Nous parvenons à la ville de Gondar et faisons rapidement la connaissance d`Alex qui se propose de nous aider dans toutes nos démarches. Il nous assiste dans les courses du quotidien. On lui demande de nous procurer du poulet, il nous amène deux coqs vivants, la seule possibilité d’avoir de la viande fraiche dans ce pays. Les enfants ont été assez impressionnes quand il les a tués et le camion était plein de sang après que virginie les aie préparés. Notre voyage dans le temps se poursuit : nous sommes dès à présent et jusqu’à la fin de notre passage dans ce pays 200 ans dans le passé! Seules les trop rares voitures nous indiquent que nous sommes au XXIe siècle. Pardon, en 1980!

     

    Nous profitons d’Alex pour changer les pneus du camion. Nous optons pour des pneus hybrides route et piste, plus silencieux, moins consommateurs, plus confortables, plus rapides et plus durables que les pneus tous-terrains qui équipaient jusque-là Chamaco. Notre expérience du désert a montré qu’ils étaient amplement suffisants. (Manu, si tu nous entends…) En attendant, nous découvrons l`Injera, le plat national  en Éthiopie. Il s’agit d`une sorte de grande crêpe fermentée faite à base de teff, une céréale locale.

     

    A ce sujet, nous avons ensuite pris connaissance que les hauts plateaux d’Éthiopie étaient, il n’y a pas si longtemps couverts de foret. Les champs ont peu à peu pris la place des arbres pour nourrir une population sans cesse galopante (plus de 6 enfants par femme en moyenne, ce qui explique le nombre de personnes croisées sur la route). Très attachés à leurs traditions, les paysans se sont accroches à la seule culture du teff qui offre des rendements biens moins inférieurs à ceux du blé ou du maïs. La foret étant en recul et la démographie galopante, les femmes doivent chaque jour couvrir une distance de plus en plus grande pour aller chercher de l’eau et du bois. De la même manière, nous découvrons dans un reportage que les paysans découvrent seulement les techniques d’irrigation, et que les nombreuses bêtes que les enfants mènent aux champs ne sert en aucun cas à nourrir la population mais constitue uniquement un signe extérieur de richesse. Les Éthiopiens se sont inscrits dans un cercle infernal et sont dépendants de l’aide internationale. On a même eu vent d’une déclaration de famine afin de profiter de cette aide, une année ou les cultures n’ont jamais été aussi abondantes. Un paradoxe qui explique que ce pays dont la nature est si riche est à la fois l’un des plus pauvres du monde…

    Revenons à notre garage. Pendant que l’on s’active autour du camion, les enfants jouent avec ceux du garagiste. Laurent lance : ``celui-là, il est trop mignon, on l’emmène avec nous!``. Lorsque plus tard le père de famille l’invite à s’assoir pour lui dire : ``tu pensais ce que tu disais tout à l`heure? Si tu le veux, je te le donne, ça me fera une bouche de moins à nourrir``, le malaise s’installe à nouveau. Au-dessus de nos têtes, les milans noirs planent en groupes serrés…  

     

    Dans la soirée, Alex, Laurent, Corentin et Marine sortent pour aller voir les danses locales dans un pub. Sur le chemin du retour, les policiers interpellent Laurent : ``Nous sommes de la police touristique. Vous ne devriez pas sortir avec cette personne. Il est connu de nos fichiers pour profiter de la largesse des visiteurs``. Il était pourtant si sympathique…

    Suite à nos difficultés sur la piste du parc de Dinder au Soudan, nous choisissons de ne plus engager le camion sur des pistes improbables. Qui veut voyager loin, ménage sa monture! Nous renonçons à découvrir le Nord du pays, le parc de Simien et ses espèces endémiques telles que le loup d’Abyssinie ou la babouin gelada. Notre objectif, quitter maintenant ce pays au plus vite et capitaliser du temps pour les pays d’Afrique de l’Est et du Sud.

    Peu après avoir quitté Debre Marcos, la ville suivante, nous croisons un couple d’aventuriers en vélo. Nous nous arrêtons pour échanger nos impressions. Ils ont fait la route depuis l’Espagne pour venir ici et n’ont jamais triché. Tout en vélo! Mais là c’est trop. Ce n’est pas à cause de la montagne qu’ils sont à bout, mais à cause des pierres lancées par les enfants. Ils ont tout essayé : la douceur, la fermeté, la fuite, humour; ils n’arrivent pas à établir le contact et leur moral atteint ses limites. Nous leurs proposons de les emmener jusqu’à la prochaine ville, en haut du plateau. Nous sommes finalement restés 5 jours avec eux, et les avons quittés à 100 kilomètres de la frontières Kenyane!

     

    Avec Chelle et Enrique, nous avons franchis des pentes vertigineuses et remonté des canyons, nous avons franchis le Nil Bleu, nous avons croisé des camions emportés par leur remorque dans les ravins, nous avons callé la boite de transfert dans des passages à pic, attendant que Chamaco avec ses chaussures de sport toutes neuves cesse de glisser à reculons dans les graviers,  nous avons soulevé des enfants trop légers, nous les avons désarmés de leur bâtons et de leurs fouets qui n’effraient que les ânes, nous avons traversé Addis, la capitale et son marché ouvert le plus grand d’Afrique, ainsi que la ville de Sheshemene, célèbre pour sa communauté Rasta, nous avons donné du pain à des hommes chaussés des dernières Nike qui se plaignaient de la faim. Chers amis, nous avons passé avec vous des jours très agréables et nous tirons un grand coup de chapeau à votre courage et à votre magnifique aventure!

     

    Il y a une ambiguïté dans ce pays, un mélange de fierté nationale, d`indépendance farouche alimentée par une Histoire riche et une pauvreté extrême qui rend les Ethiopiens dépendants de l`aide internationale qu`ils méprisent pourtant. Il est des pays qui s`offrent à nous, d`autres qui résistent et l’Éthiopie en fait partie. Nous en avons fait la traversée en 12 jours et pendant ces 12 jours les enfants n’ont pas osé sortir du camion. Ici au Kenya, Charlotte refuse de se faire toucher par une personne de couleur. Qu’est-ce qui cloche dans ce pays?

    Nous gardons toutefois en mémoire la beauté de ses paysages et espérons parvenir à vous en donner un aperçu dans notre diaporama.

    Je ne peux pas non plus clôturer cette page sans évoquer le regard envoutant de cette jeune musulmane rencontrée à Moyalē, un village frontière entre l’Éthiopie et le Kenya. Un regard furtif, fixe et pénétrant. Deux yeux sombres encadrés par une peau chocolat et un voile jaune et orange qui ouvre une porte à un imaginaire sans limites. Les femmes Ethiopiennes ont la réputation d’être belles et elles le sont!

     

    A voir : Rendez-vous en Terre Inconnue – Adriana Karembeu chez les Amharas


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  • Voic les résultats de notre sondage sur la circulation de l`eau dans un siphon au niveau de l`Equateur 

    (après plus de deux ans d'abstinence, nous ne sommes toujours pas guéris des sondages, mais nous sommes dans la bonne voie toutefois!)

    Nous vous rappelons la question:

    "Dans quel sens tourne l`eau d`un siphon au niveau de l`Equateur?"

    Voici vos réponses, les avis sont partagés.

    Dans un souci pédagogique, mais aussi de professionnalisme par rapport à nos lecteurs, nous sommes allés vérifier sur place. Voici ce que ca donne:

    Alors? Mythe ou réalité? Expérience scientifique ou arnaque pour touristes?

    Ici, à Nairobi le sujet fait débat au sein de la communauté des voyageurs...

    Et vous? Qu'en pensez-vous?


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  • Le village de Wadi Halfa nous surprend par la tranquillité de ses habitants.  Nous avons l’impression d’être encore au Moyen Orient, mais déjà en Afrique. Autour de nous, dans les radios et les télévisions, le son sourd des percussions commence à répondre au son aigre des violons de la musique orientale et les hommes se rassemblent de plus en plus nombreux pour prier autour des mosquées. Le beige cède petit à petit sa place au blanc : blanc immaculé des galabiehs, qui tranche avec la peau sombre des hommes qui les portent, blanc des véhicules. Le voile des femmes (Tobe) prend des couleurs vives. Il devient léger. Les femmes s’enroulent dans un drap unique qu'elles réajustent dans le vent du désert et nous laissent entrevoir leurs sourires. L’Islam, dans son apparence, semble ici se libérer de la rigidité que nous avons connue en Syrie, puis en Egypte.


    Nous finalisons les démarches administratives d’entrée dans ce pays qui a décidemment bien du mal à nous ouvrir ses portes. Il faut rester concentré jusqu’au bout car, même dans le sprint final, nous ne sommes pas à l’abri d’une erreur d’inattention. Une simple feuille posée sur le Coran du capitaine des douaniers et c’est toute la procédure qu’il faut recommencer, et cette fois avec femme et enfants!

    Nous suivons la route du Nil qui nous conduit jusqu’à Khartoum et profitons d’une route neuve que les Chinois viennent de finaliser.

    Lors d’un bivouac, un homme vient se joindre à notre petit déjeuner pour nous parler simplement de son pays et nous donner des indications et conseils sur la suite de notre voyage au Soudan. C’est notre premier contact avec l’hospitalité légendaire des Soudanais. Dans un premier temps méfiants lorsque nous sommes ainsi abordés, nous apprenons rapidement que toute tentative de participation matérielle à cet accueil sera vécue comme une honte pour nos hôtes. Cet homme nous parle des élections à venir. Tant que nous resterons dans le nord du pays et suivrons la route qu’il nous indique jusqu’à la frontière de l’Ethiopie, nous serons en contact avec une population éduquée et serons donc en sécurité.


    Le Sud possède un pétrole facilement extractible sur lequel les Américains ont mis la main par la force, au moyen de miradors et de forces armées. Cet homme nous apprend que les Chinois sont mieux accueillis car ils participent au développement du Nord du pays et des échanges au moyen des infrastructures routières. A ce sujet, une route reliant Wadi Halfa à Assouan devrait être réalisée dans les prochains mois. Nous sommes parmi les derniers voyageurs à réaliser la traversée de la frontière par bateau.


    Le pétrole existe également dans cette région, mais il est plus difficile à exploiter. C’est la raison pour laquelle les Américains ont décidé de la mettre en sommeil, faisant du Nord Soudan une sorte de grenier énergétique pour les années futures. En sollicitant l’expertise Chinoise plutôt qu’Américaine dans son extraction, les Soudanais espèrent profiter d’une distribution équitable des bénéfices.

    Il nous suggère un premier arrêt sur l’île de Saî à proximité, sur laquelle nous devrons pouvoir admirer les vestiges d’une forteresse ottomane construite au XVIe siècle, et peut-être même apercevoir les fameux crocodiles du Nil…

     

    Nous retrouvons ensuite, dans le cadre d’un bivouac improvisé au milieu du désert, quelques un des ‘overlanders’ avec qui nous avons effectué la traversée du Lac Nasser, dans le but de passer ensemble le soir de Noël. Les enfants ont préparé un sapin en clouant des planches de bois et les adultes ont construit un four à pain entre les pierres. Nous apportons à la table commune quelques bières que nous avons réussi à faire passer en douce.

     

    La route se poursuit vers le site de Kerma qui constitue un exemple de la structure deffufa dans l’architecture nubienne : un tumulus de pierres et de terre construit autour d’une chapelle funéraire.

     

    Nous faisons la connaissance d’un hamster des sables, téméraire jusqu’à mordre le gros orteil de Laurent.

    C’est par hasard que nous retrouvons une fois de plus nos amis overlanders sur le site d’El-Kourrou.

    Un peu de culture (eh oui, on ne parle pas que de soucis mécaniques sur ce blog !!) :
    El-Kourrou est une vaste nécropole antique utilisée entre la fin du IXe siècle et le VIIe siècle av. J.-C. Ce site est situé près de la ville moderne de Karima au nord du Soudan. Cette nécropole abrite plusieurs dizaines de sépultures de rois et de membres de familles royales, certaines sous un simple tumulus de pierres, d'autres dans un mastaba de briques crues, ou encore dans une pyramide. Ces dernières ont été édifiées avec l'avènement des « pharaons noirs » de la XXVe dynastie qui y ont leurs tombes, à l'exception de Taharqa. Les rois nubiens firent enterrer leurs chevaux avec eux dans la nécropole (Source : Wikipédia).


    A défaut de pouvoir monter au sommet des Pyramides d’Egypte, on aura grimpé (Marine y compris) sur celles du Soudan, une première selon les policiers estomaqués et passablement énervés.

     
     
    Lors d’un bivouac dans le désert, non loin de la ville d’Atbara, au petit déjeuner, nous avons vu venir trois hommes, de trois directions radicalement différentes. Après avoir partagé le thé, quelques petits gâteaux et de nombreux sourires, Virginie leur a imprimé quelques photos (ils étaient très à cheval sur le rendu de leur apparence, elle a dû s’y reprendre plusieurs fois !), ils sont ensuite repartis, l’un sur son chameau vers le levant, les deux autres vers le couchant. Qui étaient ces hommes ? Que faisaient-ils au petit matin en plein désert, à plusieurs dizaines kilomètres du premier village ? Comment nous ont-ils trouvé ? Mystère…
     

    La route du désert se poursuit par un bref passage vers les pyramides de Merowe, objet de fierté et de rivalité du peuple Soudanais contre les Egyptiens.
     


    C`est ainsi, qu`après 1200km le long du Nil depuis Wadi Halfa, nous atteignons Khartoum.


    La grande difficulté à laquelle nous sommes confrontés, et ce depuis notre arrivée au Soudan est l`impossibilité de retirer de l`argent, même dans la capitale. C`est en tentant en vain de faire cracher un distributeur que nous faisons la connaissance d`Omer, ingénieur dans l’industrie du pétrole. Il propose de changer nos derniers dollars au meilleur taux, puis insiste à ce que nous passions la nuit chez lui. Il est tard, la journée de route a été longue, nous acceptons avec plaisir. L’accueil qu’il nous réserve avec son épouse Hiba est des plus cordiaux. Sa maison est propre et fastueuse. Elle tranche radicalement avec la simplicité des demeures croisées jusque-là. Il nous parle de sa ville et de son pays et nous invite à nous rendre au parc National de Dinder, en suivant la route du Nil Bleu jusqu’en Ethiopie, et nous donne les coordonnées de son cousin Altaieb qui habite la ville de Dinder, non loin du parc. La discussion se poursuit ensuite sur le registre religieux : il commence par nous annoncer que c'est avec le Christianisme que l’Islam a le plus de points communs, que c’est dans le Coran que nous pouvons trouver toutes les réponses, même sur l’avenir. Il affirme que tous les épisodes importants de l`histoire de l`homme ont été annonces dans le Livre Saint. Il cherche le débat, nous demandant quelles pourraient être pour nous les critiques et objections à l`Islam et nous affirme qu’il peut nous apporter les réponses à notre quête spirituelle. ``C`est ce que vous recherchez dans ce voyage, n`est-ce pas ?``. Cette discussion est pour lui la manifestation du Jihad, la Guerre Sainte. Le fait d`évoquer le sujet avec un non-converti lui crédite immédiatement de points pour le Paradis. En obtenant notre conversion, le crédit de points est multiplié. Il en est de même avec tous les autres actes de Foi.


    Nous le quittons le lendemain, charmés par son accueil, mais un peu perplexes sur le contenu discussion.
     

    Par la suite, tout au long de notre passage au Soudan, il n'a cessé de prendre de nos nouvelles, de nous appeler à chaque étape de notre voyage pour s'assurer que tout se passait bien pour nous. Comme l'ont fait toutes les personnes rencontrées avant lui, il nous assure du peu d'impact que peut avoir le referendum dans le nord du pays. Comme sa maison est isolée, il a fait une demande de port d'arme dans cette perspective, la police lui en a dissuadé. Si lui ne risque rien, c'est en toute tranquillité que nous pouvons séjourner dans son pays, même après le referendum. Nous décidons de ne plus nous presser.
     

    Pour la photo ci-dessous, il a insisté pour troquer son costume contre l`habit traditionnel.

     

    Dès le lendemain, donc, nous prétextons une panne de démarreur et une pression d’eau  affaiblie dans la cellule pour nous poser pendant 10 jours dans le parking de Renault Truck. Douche, électricité, wifi. Le triangle d’or des nomades !
    C`est là que nous faisons la connaissance de Talal et Mamoun, ingénieurs mécaniciens et responsables du SAV chez RT. Tout au long de ces 10 jours, nous avons eu le temps d’échanger avec eux, de profiter d`un accueil et d`une chaleur humaine exceptionnels. Ils nous promettent de contacter le siège pour tenter de nous sponsoriser. Affaire à suivre…

    A la différence du Caire, Khartoum est une ville aérée avec de larges avenues. La ville est au croisement du Nil Blanc en provenance de l’Ouganda et du Nil Bleu en provenance de l’Ethiopie. Cette confluence donne naissance au Nil qui se dispute avec l’Amazone le titre du plus grand fleuve du mode (6500 km).

    Un soir, lors d'une dernière sortie en ville, nous sentons qu'il leur reste un dernier sujet à aborder : celui de la religion. C'est non sans mal que nous parvenons à nous extraire du débat. La solidarité l'emporte toujours sur le profit. Cette théorie s'applique également au système bancaire. Nous commençons à entrevoir pourquoi nos deux monde ont tant de mal à se comprendre…
     

    Nous quittons Khartoum en direction l'est pour nous diriger progressivement vers l'Ethiopie. Un arrêt est prévu dans la ville de Singa, ou nous faisons la connaissance d'Altaieb, cousin d'Omer. Altaieb travaille pour le ``Croissant Rouge``, la traduction Islamique de notre Croix Rouge. Il nous apprend que le centre est opérationnel en vue des élections prochaines : un nombre suffisant de volontaires est maintenant formé aux premiers secours pour parer aux débordements attendus. En contrepartie, il nous annonce une fois de plus que nous ne risquons rien, que les soudanais du nord sont indifférents à l'issue du scrutin et qu'ils ne voteront pas. Si l'on évoque la fermeture des frontières dans cette perspective, c'est pour éviter aux électeurs la tentation de voter plusieurs fois. ``De toute manière, seules les personnes du Sud votent : les primitifs. Il n'y a aucun intérêt à ce que nous prenions en photo ni n'adressions la parole aux personnes originaires de ces régions.``
     

    Le scrutin a laissé les personnes du Nord indifférentes et le jour du referendum a été un jour comme les autres dans le Nord du Soudan…
     

    L'acceuil d'Altaieb a, par contre, été une fois de plus extraordinaire : après une visite de la bananeraie qui longe le Nil Bleu, il nous présente sa famille, heureux et surpris de voir ses enfants noirs jouer avec ces enfants blancs, usant d'un langage que seuls les enfants du monde entier peuvent comprendre, constitué de rires et de gestes.

     

     Il nous explique les démarches à suivre pour pouvoir visiter le parc national : il faut se rendre à la police de la vie sauvage dans la ville de Dinder. Un garde nous escortera et nous protègera tout au long de notre séjour dans le parc.
    Il nous a fallu abattre en une après-midi les 200 kilomètres de piste. Le guide s'est avéré être un soldat armé d'une kalachnikov. Il ne parlait que l'arabe. Difficile de ne pas être mal à l'aise quand la canon se son arme à côté de lui dans la cabine pointe sur Charlotte…

    Dans le parc nous avons vu autruches, babouins, gazelles, phacochères…
     

    Veni, vidi mais pas vici. Nous avons laissé dans les arbres trop bas notre store, des joints de fenêtres, ainsi que de belles rayures sur la carrosserie du camion. Nous avons dû faire demi-tour à trois kilomètres de notre destination après avoir progressé de 26 km dans la forêt dense. Un arbre, un seul a suffi pour nous faire rebrousser chemin et c'est les 200 kilomètres de piste retour que nous avons dû couvrir dès le lendemain.

    Apres avoir ramené notre policier dans sa caserne et signalé que la route n'était pas adaptée aux camions (``Ah bon? Personne ne vous a dit? ``), nous nous arrêtons de nouveau à Singa pour offrir les restes de notre store et remercier Altaieb pour son accueil : ``Je n'ai fait que mon devoir``.
     

    Pour nous cela avait pourtant été un plaisir…
     

    Les derniers jours au Soudan ont été ensuite marqués par la route. Je noterais uniquement le regard inquiet du policier au barrage de police, une fois les palabres d'usage épuisées ; ``Sudan tamam?`` (Le Soudan, c'est bien?)
    L'accueil légendaire des Soudanais était-il vraiment spontané et désintéressé? N'était-il pas finalement motivé par la perspective d'un raccourci vers le paradis dans cette quête aux points de sainteté? Ou pire : n'est-ce pas l'image d'un peuple oppresseur qu'ils tentent de redresser aux yeux de la communauté internationale?
     

    Quoi qu'il en soit, le souvenir de la profondeur et de la gentillesse de ce peuple restera à jamais dans nos mémoires. 
     


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